Select Page

Fin août 2020, pendant que le monde s’affaire encore à répondre comme il le peut à la crise sanitaire majeure du Covid-19, à son origine présumée, en République populaire de Chine, on inaugure en grande pompe devant un grand nombre d’officiels et de médias la mise à l’eau du Sun Yat Sen University. Largement passé inaperçu dans la presse internationale, ce banal évènement, en apparence, n’en est pourtant pas un. Le navire géant de 140 mètres de long pour 19 mètres de large vient renforcer une flotte chinoise, déjà importante, de navires dédiés à la recherche océanographique pointue. Celui-ci est plus grand, a une plus grande portée et une plus longue autonomie, et embarque plus de technologies.

Formule reprise partout dans la presse locale, le bâtiment est inauguré 92 ans après la première expédition chinoise en mer de Chine orientale, spécifiquement dans les îles XiSha. Toutes personnes ayant suivi l’actualité géopolitique internationale ces douze derniers mois connaissent ces îles, mais probablement sous leurs nom Anglais, les îles Paracels.

L’expédition originelle que la presse reprend en cœur comme un slogan nostalgique, c’est celle que Pékin a conduit au début du 20e siècle, à la recherche de vestiges archéologiques et qui lui sert aujourd’hui à justifier une souveraineté sans équivoque ni contestation sur ce vaste archipel de récifs coralliens. Ces îles Paracels seraient une possession chinoise depuis toujours.

Depuis l’île de Hainan, située 300 kilomètres plus au nord, la classe moyenne chinoise peut aujourd’hui embarquer pour de luxueuses croisières à la découverte de leurs bancs de sables oubliés, et jadis habités.

La plupart des spécialistes s’accordent pour dire que ce bâtiment est largement exagéré en proportion et en armements pour les missions pour lesquelles il est programmé et qu’il s’agit probablement ici de montre ‘les muscles’ d’acier et de composite dans notre cas.

Le navire Sun Yat Sen University est aussi bon sur l’eau qu’il ne l’est dans la presse et sur les réseaux sociaux, c’est un formidable relai pour Pékin afin d’y véhiculer son message, autant à destination de ses concitoyens, qu’à celle de ces adversaires contestant sa souveraineté.

Parce que c’est là que ça devient intéressant ; quand on parle d’influence et de diplomatie on pense uniquement ou de primes abords aux bureau feutrés des États-majors ou des gouvernements, mais cette influence se joue également via la puissance industrielle et technologique navale et maritime. Avoir les capacités techniques d’exploiter un territoire marin ou ultramarin et d’y lancer ses propres programmes de recherches permet forcement d’y apposer son empreinte et de façon durable

En France on à le SHOM, (Service Hydrographique et Océanographique de la Marine) un établissement public administratif (EPA) sous tutelle du ministère des Armées. La super vitrine de l’Hydrographie et de l’Océanographie Française, qui fête d’ailleurs ses 300 ans ! Je conseille d’aller jeter un outil à leur site qui est assez fantastique httpss://www.shom.fr/. On comprend aussi que le SHOM est puissant, tant dans sa capacité à effectuer les missions que la France lui commande, mais aussi comme support et relais de l’aura français a l’international. D’ailleurs on compte bon nombre de coopérations entre nations plus ou moins alliées (au moins en termes de but commun) dans les domaines de la bathymétrie, la sédimentologie, l’hydrodynamique côtière, l’océanographie, l’ingénierie des systèmes d’acquisition à la mer, l’information géographique maritime et littorale.

Le SHOM, aux côtés d’autres institutions publiques d’importance comme l’IFREMER ou privées comme IFP Énergies Nouvelles, contribuent à la puissance et l’influence Française et à sa légitimité lors des programmes de type EXTRAPLAC , qui , autorisés par les lois des convention des Nations Unies, permettent de ‘gagner’ des kilomètres carrés de ZEE précieux. On en reparler dans un autre billet.